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Fantaisie, légèreté et autres turbulences
10 novembre 2010

Hommage

Ainsi que je l'ai déjà exprimé, Novembre est un mois déprimant mais aussi de souvenir...C'est pourquoi j'ai choisi de publier aujourd'hui une nouvelle intitulée "Le syndrome de Don Quichotte". Je vous la présente en entier et non pas en épisode comme précédemment car vous le comprendrez en la lisant, cela ne s'y prête absolument pas. Alors certes, ce n'est pas précisément amusant mais il me tenait néanmoins très à coeur de rendre hommage à une personne qui m'était plus que chère et où qu'elle soit, cela ne m'empêche pas de penser à elle quotidiennement. C'est aussi une façon de la faire vivre encore au travers de ces lignes et par le truchement de vos yeux, merci à vous .Lisa Montia

Le syndrome de Don Quichotte

Après quoi courrons-nous tous ? La question peut sembler stupide de prime abord, certes ! Néanmoins, la poser n’est pas si futile que cela. Certains recherchent la réussite financière, sociale, amoureuse, d’autres essaient de trouver la sérénité en passant par la religion, les thérapies en tous genres, d’autres moins favorisés, tentent de recouvrer la santé, mais une chose est certaine, quelque soit la quête de chacun, le but ultime de notre vie est d’atteindre sa propre conception du bonheur.

Pourtant, certains sont irrémédiablement poussés vers des soifs inextinguibles…

Elle est jeune, jolie, intelligente, courageuse, trop peut-être…

Il était jeune, adorable, spirituel, fragile, secret, trop sûrement…

La première grande épreuve de sa vie avait été une confrontation à l’homme dans ce qu’il a de plus vil et abjecte, une confrontation familiale de plus, est-ce ceci qui avait à jamais tracé sa destinée ? Etait-ce la cause qui avait généré l’apparition de cet étrange syndrome ?

Quant à lui, quelle avait été sa première grande épreuve ? Difficile de le dire tant ce garçon était impénétrable. Toutefois, on savait qu’une histoire d’amour avortée l’avait fortement brisé et que bien que tout semblait rentré dans un certain ordre, si ordre il y a dans une vie, les blessures devaient être bien mal cicatrisées pour qu’il développe ce même syndrome.

Leurs vies n’avaient rien en commun, bien qu’ils se soient croisés quelques fois, pourtant et sans le savoir ils étaient atteints du même mal.

Mais qu’est-ce que cette étrange affection ?

Le syndrome de Don Quichotte est une altération du sens émotionnel et une hyper sensibilité qui consiste à ne se passionner que pour des causes perdues d’avance quelque soit le domaine .Il pose la question de la folie, de l’idéal mais de manière irrationnelle et de ses capacités à créer son monde. En fait, celui qui en souffre s’obstine jusqu’au bout à croire qu’il va parvenir à surmonter les épreuves, les prend même comme une sorte de challenge. Il est convaincu que la cause est juste et qu’il faut seulement y mettre du sien pour parvenir à ses fins. Il est doux, gentil, ouvert, attentionné pour tous sauf pour lui-même. Cela n’a rien à voir avec de la persévérance, judicieuse et nécessaire dans toute entreprise, non, car n’importe quel être vivant dénué de ce mal, décèle immédiatement le bien fondé d’un combat. Les combats menés par ces êtres là ressemblent évidemment à ceux que Cervantès fait mener à son héros, les moulins à vent peuvent se cacher sous bien des aspects.

Elle donc, avait vécu des histoires d’amour torturées, cherchait-elle encore l’être idéal à ses yeux ? Oui bien entendu !

Professionnellement, elle avait aussi pas mal erré dans différents secteurs mais cependant reliés tous par la même envie d’être utile aux autres. Pas question de baisser les bras, elle menait l’assaut chaque jour jusqu’à l’épuisement tant physique que moral, n’écoutant que son cœur et son courage et cela malgré l’adversité à laquelle elle devait se confronter. Tout était requis pour que n’importe quelle personne émotionnellement équilibrée se rende à l’évidence et mette un terme à cette lutte stérile. Mais pas elle naturellement, elle imaginait cette quête comme un passage obligé pour atteindre la consécration. Mais de conditions de travail déplorables en échec aux concours, de désarroi en désillusions, les choses allaient de mal en pis sans parler de problèmes financiers qui   détérioraient une situation déjà bien précaire.

Alors bien sûr, autour d’elle, il n’y avait pas qu’un seul « sancho panza », les amis étaient fidèles et présents, ils se conformaient à la vision de celle-ci par respect et surtout par amour mais que peut une armée même aimante face à une personne qui refuse tout avis extérieur tout en faisant croire qu’elle en prend acte ? On peut être clairvoyant mais inutile…

Et infailliblement s’ajoutait le sentiment amoureux, après avoir crû aux princes charmeurs, elle avait jeté son dévolu sur LUI ! Sa « Dulcinée du Toboso » à elle était un homme inconstant. Contrairement à elle, la fuite était la seule issue qu’il trouvait pour résoudre les conflits. Ces deux êtres là s’aimaient mais tellement mal. Elle lui vouait un amour idéalisé malgré les affres d’une réalité qui les malmenaient et lui ne réussissait pas à faire le deuil d’une vie passée et à sauter à nouveau dans le grand bain de l’amour. Il ne trouvait pas sa place quelque soit l’endroit où il se situait, auprès ou loin d’elle.

Alors évidemment en de telles circonstances et si ardente que soit la flamme, le chaos final semblait inévitable, du moins pour ceux qui parviennent à démêler le possible du probable. Les ruptures étaient aussi nombreuses que les réconciliations jusqu’au jour où l’une d’entre elles s’additionna malheureusement à la somme déjà lourde du fardeau qu’il lui fallait porter.

Alors la phase aigue du syndrome se dessina irrémissiblement et emporta tout sur son passage comme une lame de fond. En effet, quoi de plus ardu pour une personne comme elle que d’admettre la perte de la bataille, impossible ! Malgré tout ce qui pouvait encore donner un sens à sa vie, la défaite était intellectuellement inadmissible. Alors que faire face à cela, sinon partir ? Partir en restant en accord avec ses pensées, ajuster celles-ci à ses actes. Commettre l’irréparable pour se réparer soi-même. « Aimer jusqu’à  la déchirure, atteindre l’inaccessible étoile ». Faire cesser cette douleur qui brûle, qui ronge, qui détruit tout le beau de la vie, qui assène des coups d’une violence inouïe par le truchement de n’importe quel menu détail de l’existence : un lieu, une odeur, une chanson…

La décision n’était pas réfléchie, elle était juste un geste salvateur au moment de l’acte. Mais dire au revoir quand même, malgré tout…Un adieu qui la sauva, contre son gré. A-t-on le droit de vie sur l’autre ? A-t-on le droit de choisir pour l’autre ? Lorsque le médecin du SAMU arriva, il lui dit simplement ceci : « vous n’êtes pas en état psychique de décider ce qui doit advenir de vous, nous sommes là pour pallier à cet état de fait… » C’est un grand débat d’actualité que de disposer de sa vie, doit-on accorder ce droit uniquement aux gens souffrant de maladies incurables et atrocement éprouvantes ? La douleur qui était sienne bien qu’invisible était-elle moins respectable ? Honnêtement, ces questions là on se les pose ensuite, lorsque l’on est confronté à ce type de situations, on est dans l’urgence. Une course contre la mort qu’il faut gagner à tout prix, fusse t-elle au détriment des choix de l’autre. Est-ce une manière aussi de se protéger de la souffrance d’une perte, un acte égoïste qui se fait au dépend du mal être d’autrui ?

Elle a survécu, puis elle a de nouveau repris ses folles poursuites, pour combien de temps, au prix de combien de blessures ? Si elle n’a pas eu le choix de sa mort, elle a néanmoins celui de sa vie, il lui appartient. Les fidèles « Sancho Panza » sont toujours là guettant le moindre signe alarmant, espérant que cette quête aboutira sinon dans son ensemble, en tous cas suffisamment pour faire pénétrer une certaine sagesse dans cette vie si tourmentée. Ne sommes-nous donc pas tous des rêveurs alors, peut-être qu’il ne s’agit là en fait que d’une foi viscérale dans la vie…

L’avait-il lui, la foi dans la vie ? Qui le saura jamais ? Lorsque le secret tapisse à ce point une existence, que peut-on réellement en déduire ?

Quelques années auparavant, une forte dépression l’avait terrassé, elle était due à un sentiment d’échec général. Une vie amoureuse détruite, une vie professionnelle qui ne lui convenait pas, une vie tout simplement sans saveur. Pourtant, il était entouré par sa famille et ses amis, il vivait dans des conditions confortables mais rien ni personne ne peut jamais combler un vide intérieur si abyssal. Il faut se résoudre à accepter que finalement on est toujours tout seul face à soi- même quelques soient les efforts que l’on déploie pour croire le contraire. L’admettre c’est déjà un début de solution, mais faut-il encore avoir la force de se faire face. Il n’avait pas refusé ce vis-à-vis intime, c’était même précisément sa quête. La première fois, il avait accepté l’aide extérieure et semblait même avoir remporté la victoire, mais assurément pas la guerre. Quel évènement précis l’avait fait à nouveau chuter ? Y en avait-il seulement un ? Probablement davantage une suite de petites choses qui s’accumulaient et qui, peu à peu, envahissaient son histoire, la grignotait insidieusement jusqu’à la rendre si friable et perméable que plus rien n’avait de sens. Alors face à cette nouvelle épreuve, mais était-elle si nouvelle que cela, il était décidé à agir en  chevalier bravant les obstacles avec obstination. Un chevalier qui arborait non pas une triste figure mais un masque camouflant sa dérive. Il était persuadé que ce serait seul qu’il parviendrait à vaincre, et surtout ne supportait pas l’idée de pouvoir générer chez les autres de la peine ou de la compassion dans le pire des cas. Son obsession avait toujours été de ne jamais décevoir ceux qu’il aimait. Il répugnait tout autant à se décevoir lui-même. Alors quelles armes avait-il en sa possession ? Pas d’armure et des forces qui s’amenuisaient progressivement pour faire place à la désespérance. Avait-il l’étoffe du héros ? Il lui fallait se donner du courage, puiser quelque part une énergie qui commençait à lui faire sérieusement défaut. De même que certains artistes avalent une gorgée d’alcool avant de monter sur scène pour faire face au public qui attend  d’eux le meilleur, il avait doucement, d’un verre à la bouteille, plongé dans cette illusion. L’alcool n’était pas une fin en soi, loin de là, mais juste un moyen de donner le change. Il en avait besoin pour se sentir plus fort et en même temps, sentait très bien que ce n’était qu’un leurre. Cela  aboutissait à une terrible conclusion : au lieu de le renforcer, cela ne le détruisait qu’un peu plus jour après jour. L’image que cela lui renvoyait le dégoutait chaque jour davantage, et plus il se dégoutait, plus il faisait semblant et plus il avait besoin de boire pour avoir le courage nécessaire de faire semblant. Existe-t-il un remède contre une telle souffrance ? De plus lorsque celle-ci n’est plus seulement psychique mais aussi physique, car le corps finit malheureusement toujours par avoir le dernier mot… Mentir, cacher, cloisonner son existence afin de limiter les dommages collatéraux, se perdre dans les méandres de l’irraisonné puisqu’il y a longtemps que l’on est plus soi-même raisonnable… Mais à la fin, avoir tellement mal, s’étioler, se détériorer et ne plus pouvoir tolérer l’intenable, l’imbuvable…

Le preux chevalier errait dans un monde parallèle, tentait de gagner le combat contre son propre mal, ses moulins étaient la torpeur et la détresse et il avait bien souvent dû chevaucher jusqu’au bout de la nuit une « Rossinante » qui s’était métamorphosée en bouteille pour tenter de triompher.

Dans ce cas aussi, le syndrome avait atteint son paroxysme, alors quoi ? Une nouvelle fois, s’enivrer pour oublier ce qu’on est devenu et ce qu’on n’arrive pas à être ? Pourquoi pas, quelle importance finalement ? La fatigue s’imposait à lui, si lourde, si oppressante. Avoir juste envie de poser un peu son sac afin de repartir de plus belle ensuite… Mais il est parfois des haltes qui sont fatales, et l’épuisement de l’esprit est proportionnel à celui du corps. Il avait dû le pressentir mais il n’avait plus assez soif : soif de vivre… Il n’avait plus assez de cœur à l’ouvrage, alors le sien a lâché.

Il est parti, laissant derrière lui ses proches dans une peine et une stupeur incommensurables mais conservant pour ce beau chevalier un profond respect pour sa grandeur d’âme, sa qualité d’être humain et espérant qu’enfin il a trouvé la paix en atteignant pour toujours ces étoiles que l’on dit pourtant inaccessibles.

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Commentaires
R
A la premiere lecture, ils y a bien longtemps, j'avais survolé car sans doute trop douloureux. Tu m'as remise sur le circuit de la lecture et a la seconde vue... Tu me tires les larmes du coeur... Merci! c'est magnifique!
I
c'est parce que précisément la vie nous file parfois des grands coups de bambou que l'on en apprécie davantage encore les bons moments et surtout que l'on a envie d'humour, de sourire et de rire, cet hommage est donc tout aussi important pour moi que de continuer à écrire et à partager, avec ceux qui viennent me rendre visite, fantaisie, légèreté et autres turbulences !!!
C
triste est cette nouvelle ....<br /> je ne trouve pas d'autres mots que je puisse mettre sur la toile.<br /> Bisous ma belle !
L
On pourrait résumer ça autrement:<br /> Leur regards se croisèrent, leurs coeurs firent boum en même temps. Ils eurent 4 enfants et vécurent reureu toute leur vie. On ne sut jamais pourquoi!!<br /> Bonjour chez vous!!!
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